4 Mars 2010
L’évolution naturelle et la politique peuvent bien augmenter le champ de liberté, certains penseurs estiment que celle-ci est également contrainte par l’individu lui-même. Spinoza appartient à cette catégorie de philosophes pour qui la liberté absolue est un leurre. En effet, il existe toujours des motifs intérieurs, propres à la personne, empêchant l’exercice du libre-arbitre. Ces contraintes sont conscientes, comme les besoins physiologiques qu’il faut satisfaire pour vivre, mais d’autres sont bien plus insidieuses. La notion d’inconscient n’existe pas encore à l’époque de Spinoza mais celui-ci en a l’intuition. La vraie liberté serait celle qui permet à chacun de déterminer sa volonté et d’être en mesure d’agir en conséquence. Sauf que l’homme ne connaît pas toutes les causes qui le poussent à s’animer. Sans aller jusqu’à parler de manipulations, ni de prétendre à l’existence d’un marionnettiste guidant chacun de nos pas, l’être humain ne peut pas se considérer comme son propre maître. Certaines choses, qui pourtant ne concernent que lui, sans qu’aucune pression extérieure ne soit exercée à un instant donné, lui échappent. L’inconscient sera plus tard le concept résumant cette impuissance de la condition humaine.
La liberté individuelle suppose également d’encadrer la volonté, par la fixation en toute indépendance d’objectifs, et d’adapter son comportement en conséquence. Pour reprendre un discours kantien, il convient de faire preuve d’autonomie, à la fois vis-à-vis d’autrui, mais également face à ses passions. La liberté d’un artiste par exemple repose sur une discipline personnelle pour l’accomplissement de son art. Sa volonté doit s’inscrire toute entière dans la réalisation de son œuvre pour qu’ainsi il ne s’écarte pas du destin qu’il s’est fixé. L’homme libre est donc celui qui sait se contenir, ce qui peut sembler paradoxal lorsque la liberté est envisagée comme l’absence de contraintes pesant sur l’individu. Sauf que cette condition n’est pas réalisable car la liberté est avant tout à apprécier d’un point de vue relationnel, qu’il s’agisse d’autrui et de soi. L’homme ne peut pas échapper à la nécessité, mais son étendue n’est pas figée et ainsi il peut s’armer pour la réduire au maximum, selon ses possibilités et en se connaissant toujours mieux.