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25 Janvier 2013
Ce qui n’est pas est possible. Ou alors toute possibilité disparaît une fois le fait accompli, l’acte réalisé, l’évènement survenu. Raisonner ainsi revient à penser que le réel est empli de possibilités, comme s’il existait un magasin où nous viendrions, sans le savoir, piocher ce qu’il advient. Ce qui arrive serait donc conditionné à ce qui est possible, ou encore la possibilité serait à la source de l’être, pas totalement un néant bien qu’inexistante, parce que portant en elle comme une puissance d’être prête à la réalisation. Il est aisé, et peut-être même rassurant, de différencier de la sorte ce qui est de ce qui n’est pas, en introduisant entre les deux une transition, quelque chose de suspendu, un tampon en quelque sorte entre l’être et le néant. C’est moins brutal que de penser que le rien n’a aucune raison d’être, que l’imaginer n’a aucun sens. Nous pensons pourtant que tout est possible bien que nous soyons incapables d’envisager toutes les possibilités, parce que contrairement à ce que l’on croit, ce qui est possible advient une fois que la chose est effective, et non l’inverse. La possibilité naît par défaut, en imaginant ce qui aurait pu être sur la base de ce qui est. La possibilité est une illusion rétrospective, un regard dans le rétroviseur, et non une projection vers l’avenir. C’est Bergson qui nous renseigne le mieux à ce sujet, et nous soigne peut-être aussi. La vision bergsonienne met fin au regret. Le regret en effet est un sentiment, sans valeur objective. Il se nourrit d’une comparaison entre ce qui est et ce qui aurait pu être. Mais comme nous l’avons dit, ce qui aurait pu être ne peut exister qu’en comparaison de ce qui est. Autrement dit, je ne peux objectivement rien regretter parce que rien n’est possible avant que d’être. Le possible appartient bien plus au présent qu’au passé, certainement pas au futur nous dit Bergson.