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Les chemins de la culture

Philosophie, économie, politique, littérature, la culture rendue accessible à tous

Explication et commentaire à propos du mythe d'Icare...ou quand l'homme tombe en oubliant qui il est

Mythe-Icare-envol.jpgIcare, s'approchant trop près du soleil, vit fondre la cire qui maintenait les ailes sur son corps, et ainsi il tomba. Mais avant que cela n'arrive, son père Dédale avait construit un labyrinthe, sur injonction du roi Minos, celui-ci ensuite y placant au centre le Minotaure, mi-homme, mi-taureau, créature née de l'accouplement de son épouse, la reine Posiphaé, avec un taureau, et ce grâce à un subterfuge imaginé par le même Dédale. Minos ne pouvait supporter cette naissance et ce qu'elle représentait. Il fallait donc cacher la bête dans un endroit où personne n'irait la rejoindre, sauf à se trouver prisonnier à jamais du lieu sans issue et sans possibilité de retour en arrière où elle logeait. Peu de temps après que le Minotaure fût installé, Dédale fît personnellement l'expérience de l'ingéniosité et de l'efficacité de son édifice, lorsque Minos ordonna qu'ils soient, lui et son fils Icare, conduits dans le labyrinthe afin que tous deux tombent définitivement dans l'oubli, et ainsi restent muets à jamais à propos de l'enfantement de Posiphaé. Mais Dédale est plein de ressources, et il comprend que la seule porte de sortie de cette prison qu'il a lui-même conçu, se trouve dans les airs. Avec de la plume et de la cire, il fabrique des ailes, une paire pour lui, une autre pour son fils, et leur envol signifiera donc la fin de la captivité. Mais avant de s'élancer vers le ciel, Dédale prévient Icare : « Je te conseillle, dit-il, Icare, de te tenir à mi-distance des ondes, de crainte que, si tu vas trop bas, elles n'alourdissent tes ailes, et du soleil, pour n'être pas, si tu vas trop haut, brûlé par ses feux : vole entre les deux ! » (Ovide – Métamorphose). C'est la juste mesure, sans excès, ni carence, que recommande Dédale. On connaît la suite. Mais pourquoi Icare est-il donc allé si haut, alors qu'il avait été averti du danger ? Parce qu'il s'est oublié, ivre d'une expérience nouvelle dépassant d'un coup ses facultés. Dans le ciel, Icare s'est pris pour un oiseau en transgressant sa condition naturelle, tout cela grâce à des ailes fabriquées. Il ne devait pourtant son nouvel état qu'à un procédé artificiel. Mais il a fait de cet expédient un prolongement de lui-même, en omettant que tout artifice est conditionné, soumis à des contraintes, et qu'ainsi la puissance qu'il confère s'en trouve limitée. La prudence aurait suffi pour préserver Icare de sa perte, mais sa jeunesse la lui a interdite. Jeune, il est avide d'intensité. Ce qu'il fait doit l'être pleinement, sans frein, sans mesure, sans considérer ce qui est possible et ce qui ne l'est pas. Cette considération pour Icare, comme pour la jeunesse qu'il représente, vient après l'acte, par constat, et non avant d'agir, avec la réflexion. Icare incarne également la volonté de l'homme d'aller toujours plus loin, plus haut, de surmonter son identité naturelle et ainsi gagner chaque fois un peu plus de liberté. L'être humain n'a cessé, et ne cessera pas de son vivant, de projeter le dépassement de son état. Voilà qui est très bien, car il s'agit de s'éloigner d'une condition, parce qu'elle est innée, inégalitaire. Mais le mythe d'Icare prévient qu'il ne faut pas être totalement amnésique avec la nature, qu'il est nécessaire de se souvenir d'où l'on vient, de celle qui nous a faite. On ne progresse qu'à partir d'un point de départ, et ce point sera toujours le même, quelque soit la distance parcourue, alors qu'aucune arrivée précise ne nous est promise...et c'est tant mieux.

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