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Les chemins de la culture

Philosophie, économie, politique, littérature, la culture rendue accessible à tous

Une histoire résumée de la philosophie occidentale - Partie 5 - Pyrrhon, Epicure, Lucrèce, puis les stoïciens, à la recherche de la sagesse

Epicure-lucrece.jpgSocrate, Platon et Aristote, ont considéré chacun à leur façon que la vérité existe et qu'elle est atteignable. Le premier s'était déjà opposé aux sophistes, ceux-ci privilégiant l'efficacité du discours sur le vrai. Les sceptiques à leur tour s'inscrivent quelque peu dans la lignée sophistique, en affirmant que la vérité n'existe pas. Pyrrhon fût le penseur emblématique du scepticisme, courant de pensée qui perdurera après la mort de son plus illustre représentant, grâce à d'autres comme Montaigne qui fît du doute le garde-fou contre le dogmatisme. Pour Pyrrhon, le réel est indifférent, et sa mesure est impossible. Que l'homme juge ou qu'il ressent, rien de vrai ni de faux ne résulte de ces états. Le monde n'a rien à nous dire qui soit véritable, donc rien ne sert de juger, ni de conclure. Pyrrhon recommande le silence, car grâce à lui viendra la sérénité. Toute ontologie est sans issue, l'essence n'existant pas. Seule l'apparence peuple le monde. Que dire alors de la morale, et de la pression qu'elle induit et qui pourtant est inutile : sans vrai, point de bien, en prenant à contre-pied la logique socratique.

Pyrrhon n'est pas dogmatique, Epicure l'est. Pour celui-ci, la vérité existe, et c'est la sensation qui nous donne à la connaître, avec la raison. Le monde épicurien est la résultante d'atomes. Il faut aussi du vide et un mouvement indéterminé, le clinamen, pour que les atomes se rencontrent, s'entrechoquent, et ainsi la matière se crée. Epicure poursuit le matérialisme développé en son temps par Démocrite, et il le dépasse. En effet, il ne se limite pas à une description du réel. Il fonde une éthique, sur la base de ses observations physiques. La morale épicurienne est hédoniste et eudémoniste. Hédoniste car toute action doit être guidée par la recherche du plaisir. Eudémoniste parce que toutes les actions plaisantes concourent au bonheur, soit l'atteinte du souverain bien. Autrement dit, le bonheur est une fin en soi, la fin de toute chose. Cependant, le plaisir épicurien est ascétique, nullement une incitation à la débauche et à la jouissance incontrôlée. Il est question de se satisfaire de ce qui est naturel et nécessaire : manger et boire pour vivre, disposer d'un toît et de vêtements pour exister socialement, aimer et philosopher pour être heureux. La sagesse selon Epicure est la capacité à ne pas exprimer le manque, à ne pas se laisser emporter par le désir, car l'on désire ce qui nous manque. Etre sage permet d'atteindre un état de l'âme sans trouble, l'ataraxie, et donc de ne pas être tourmenté ni par le passé, ni par le futur. Le premier en effet saisit l'âme avec des remords ; le second angoisse. Seul le présent est ce à quoi l'homme doit s'attacher, car le bonheur s'y trouve, ici et maintenant. Pour Epicure, le présent est aussi éternel, et s'y engager totalement permet à l'homme, être pourtant fini, de goûter à l'éternité. Epicure dira ainsi que le sage est celui qui vit « comme un dieu parmi les hommes ». Des dieux d'ailleurs, point de crainte à avoir selon la pensée épicurienne. Le monde est matière et c'est le hasard qui le forme. Epicure rend à l'homme sa liberté, sans pour autant constester l'existence de dieux, mais en les considérant indifférents à la destinée humaine. Il est aussi le philosophe cherchant à mettre en lumière le caractère insensé de toute superstition qui pour lui asservit l'homme. Le bonheur appartient à l'être humain, et n'est pas la propriété d'entités divines ou surnaturelles. La pensée épicurienne est donc résolument thérapeutique. Elle soigne l'âme, et le traitement selon Epicure est le suivant : « Il n'y a rien à craindre des dieux ; il n'y a rien à craindre de la mort ; on peut atteindre le bonheur ; on peut supporter la douleur. »

Lucrèce, disciple d'Epicure à deux siècles d'intervalle, reprend la pensée de son maître, sous une forme poétique et tragique. La lumière selon lui se fait aussi sur l'obscurité. Lucrèce n'en poursuit pas moins l'idée épicurienne que le monde n'est pas gouverné par Dieu, ou des dieux. C'est ce qui les oppose tous deux aux stoïciens. Ceux-ci sont également matérialistes, mais il n'empêche que selon eux, le monde est soumis à un ordre prédéterminé, et c'est ordre est Dieu. L'homme doit donc s'y conformer, et il peut le faire avec la vertu. Le stoïcisme est avant tout une philosophie de la volonté. Il faut vouloir, et non désirer, vouloir ce qui dépend de nous et ne pas désirer ce qui nous échappe. Les stoïciens concluent d'ailleurs leur pensée aussi par une définition du sage : c'est celui qui ne désire pas plus que ce qui est en son pouvoir, et qui accepte ce qu'il ne peut influencer.

Même si le contenu est différent, le stoïcisme et l'épicurisme, tout comme le scepticisme, proposent une voie pour atteindre la sagesse et de vivre le bien-être. Le christianisme qui leur succèdera est tout autre. Bientôt il ne s'agira plus de vivre en sage, mais de vivre sagement pour atteindre le salut, soit le bonheur après la mort.

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