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Les chemins de la culture

Philosophie, économie, politique, littérature, la culture rendue accessible à tous

La mort ne peut pas tout selon Jankélévitch...ou le vivant nous sauvant à jamais du néant

Mort-Jankelevitch-copie-1.jpgLa mort condamne le vivant, mais elle ne détruit pas tout. Il reste pour chaque vie, dès lors que celle-ci n’est plus, un petit quelque chose, soit d’avoir été. Tout défunt a vécu, et ce vécu, cette existence, qui s’arrête pour toujours, n’en est pas moins éternelle dans le fait d’être née et de s’être déroulée. On ne peut supprimer ce fait, pas même la mort ; la toute-puissance destructive qu’est la mort ne peut anéantir totalement, tel est le message de Jankélévitch dans son essai La Mort : « […] la mort détruit le tout de l’être vivant, mais elle ne peut nihiliser le fait d’avoir vécu ; la mort réduit en poussière l’architecture psychosomatique de l’individu, mais la quoddité de la vie vécue survit dans ces ruines ; tout ce qui est de la nature de l’être est destructible, c’est-à-dire offre d’innombrables prises à la démolition, à la désagrégation, à la décomposition ; seul ce je-ne-sais-quoi d’invisible et d’impalpable, de simple et de métaphysique que nous appelons quoddité échappe à la nihilisation. En cela du moins il y a un impérissable dont les griffes de la mort ne se saisissent jamais ; en cela du moins la toute-puissante ne peut pas tout. » Voilà donc que la mort n’est pas absolue. Elle n’est que la conclusion d’une vie, un trait dans l’histoire sans être en mesure de néantiser celle-ci. Jankélévitch décèle également le petit quelque chose qui différencie le néant de la mort. Le vivant nous extirpe du rien absolu sans que la mort ne nous y renvoie absolument. Certes, dès lors que la vie est finie, nous ne sommes plus, mais nous ne redevons pas rien totalement, parce que nous avons laissé une trace indélébile, inscrite éternellement. Nous avons vécu et cela personne, ni homme, ni dieu, ne peut nous l’enlever. Le vécu est lui bien absolu car il ne meurt jamais. Il dépasse même le néant car celui-ci peut un instant ne plus être en s’effaçant devant le vivant, alors que le vivant une fois mort devient vécu et le restera pour toujours. Avec Jankélévitch, nous comprenons que la valeur de la vie n’est pas seulement liée au fait qu’elle ne dure pas, mais aussi et peut-être surtout que la mort lui confère une dimension d’absolu, celle d’avoir été et ce pour l’éternité. Une fois vivant, à jamais nous sommes sauvés du néant.

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D
<br /> Le vécu de qui ? Le souvenir d’avoir vécu appartient à ceux qui vivent encore : celui qui est mort n’a pas de souvenir, la mort l’a entièrement détruit, corps et âme. Le fait d’avoir vécu demeure<br /> pour ceux qui encore peuvent voir cette « quoddité » : les œuvres, les souvenirs. Jankélévitch se contente de mots. La mort a ceci de tragique qu’elle annihile rétroactivement tout pour celui qui<br /> meure : a-t-on passionnément aimé la vie ? tout d’un coup plus rien ! Je meurs : l’être aimé meurt pour moi. La mort est une loi rétroactive. On ne laisse que tristesse autour de ceux qui se<br /> souviennent ou bien des signatures au bas de ses œuvres.<br /> <br /> <br />
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