13 Novembre 2011
La poésie est un emploi du langage différent de l’entreprise prosaïque ou discursive. Alors que le prosateur ou l’orateur cherche la correspondance directe la meilleure qui soit entre le mot et l’idée, le poète, lui, tente de trouver dans chaque recoin de la langue de nouvelles voies d’expression. Il force les mots pour signifier ce qu’il voit, ce qu’il sent, ce qu’il ressent. Cet effort passe par des associations de mots inhabituelles, par des édifices métaphoriques ou des constructions allégoriques, par des rythmes hors du commun. Le poète rompt les habitudes de langage et se distingue des styles conventionnels. Et même si la poésie est un genre littéraire, ce qui suppose que l’on y trouve des règles d’usage, il y a toujours dans le poème une part que l’on n’attend pas, une surprise qui n’est ni un piège, ni un coup de théâtre, mais la réalisation d’une création offerte à notre interprétation. On est surpris par ce que l’on ne connaît pas. La poésie, en introduisant de la nouveauté, ne se borne pas à livrer des agencements, et ainsi elle déroute. Il faut la lire, puis la relire, s’emporter d’abord contre l’hermétisme que laisse une première lecture, la délaisser ensuite pour souffler, et puis finalement y revenir, les lèvres et la voix prêtes à conquérir ces rimes si pudiques. La poésie est comme une digue qui se surmonte avec beaucoup d’élan. Un esprit statique n’y parvient pas. Il faut du mouvement pour s’approprier le vers. La poésie n’est pas un texte ordinaire qu’un œil distrait peut pénétrer. Elle se mérite et c’est pour cela qu’elle récompense. Quel bonheur en effet que de traverser sonnets, ballades, odes, que de se laisser bercer par quelques allitérations ou assonances, que d’accompagner le poète dans des détours élégiaques ou alors, avec lui, célébrer une vision du monde. Parce que la poésie explore la vie de façon singulière, elle est une ouverture pour vivre plus.