6 Novembre 2010
Wittgenstein pense, avec la publication en 1921 de son essai Tractatus logico-philosophicus, avoir résolu tous les questions philosophiques restées en suspens. Qu'il ait raison ou non, sa pensée n'en sera pas moins très influente chez bons nombres de philosophes du XXème siècle, notamment chez ceux qui adhèrent à la philosophie dite analytique. Que nous dit donc Wittgenstein pour susciter un tel engouement ? Que le langage ne peut pas tout, et qu'ainsi le silence parfois est nécessaire. Sa conclusion : « Ce dont on ne peut pas parler, il faut le taire. » La proposition est directive, cependant il ne faut pas la comprendre comme une simple injonction visant à faire taire celui qui parle sans connaître ce dont il parle. Wittgenstein met bien plus en évidence les limites du langage quant à décrire le réel. Les mots selon lui ne suffisent pas pour saisir la totalité du monde, pour ce qui est plus précisément du domaine de l'indicible. Wittgenstein conclut de la sorte après avoir réfléchi le rapport entre le réel et la pensée. Il nous explique que l'homme se représente mentalement ce qui est avec le langage, et ces représentations sont, selon les termes qu'il emploie, des « tableaux » censés restitués l'ensemble des faits à l'origine du réel. Mais pour que ces tableaux soient en adéquation avec ce qui est, qu'ils disent en quelque sorte la vérité, encore faut-il qu'ils soient produits selon une « forme logique » ; autrement dit, qu'ils s'inscrivent dans la logique des faits pour en délivrer tout le contenu. En suivant cette piste de réflexion, Wittgenstein va inventer une nouvelle transcendance, laquelle porte sur les conditions rendant possible l'accord entre le monde et les mots. Il existerait ainsi une structure logique impactant le déroulement des faits, qui rappelons sont constitutifs du réel, et le langage à son propos ne peut rapporter le vrai à la condition d'être en analogie avec cette structure. A défaut, ce qui est pensé, ce qui est dit, ou encore écrit, n'est qu'une production de l'esprit échouant sur un non-sens. Le langage procède donc d'une structure logique dont il faut, pour Wittgenstein, tenir compte afin de s'éviter des absurdités. Néanmoins, il nous prévient que la « forme logique », trait d'union entre le monde et les mots, parce qu'elle est transcendale, nous échappe. L'homme n'a ainsi pas les moyens de produire une recette, ou un système, qui encadre totalement le rapport entre sa pensée et ce qui l'entoure. Des logiques lui sont inaccessibles, et c'est alors que le silence est recommandé.