Philosophie, économie, politique, littérature, la culture rendue accessible à tous
27 Août 2010
Chapitre précédent : Partie I - La justice, entre institution et valeur
Il est plus facile de déterminer ce qui est injuste, que de donner une définition du juste. Tout le monde a ressenti au moins une fois au cours de son existence le sentiment d’injustice. D’ailleurs, il s’agit d’un sentiment qui participe de l’éveil moral de l’enfant. Ses premières confrontations avec l’injustice d’autres enfants ou de ses parents à son égard lui laissent certes une impression désagréable, mais elles le construisent dans son rapport avec autrui et lui donnent une première perspective de ce qu’un comportement peut avoir de juste ou d’injuste. Néanmoins, cette incursion dans le paysage de la justice est un apprentissage, et aucun ne saurait être le même pour tous. Une sensibilité se crée chez l’enfant en fonction de ses découvertes et de la place qu’elles occupent dans son éducation, et ainsi la faculté personnelle d’estimer ce qui est juste ou non est une production de cette phase éducative, donc d’un parcours personnel. Cette production ainsi ne peut être universalisée pour définir par défaut ce qui est juste, par opposition à l’injustice éprouvée. En outre, le sentiment d’injustice n’est pas exclusivement centré sur soi, mais il concerne également autrui dès lors qu’il est victime et que l’on se sent solidaire de lui. Là-aussi, c’est la sensibilité qui entre en ligne de compte, mais pas seulement. L’information s’ajoute car elle est nécessaire pour un observateur afin d’évaluer un état. Mais le niveau d’information n’est pas le même d’une personne à l’autre, ou l’interprétation de l’une et l’autre diffère entre elle, ce qui conduit à des avis divergents à propos d’un même fait. Qu’il s’agisse d’un sentiment d’injustice à son propos ou à l’égard d’autrui, il est le résultat d’un jugement personnel, tangible, instable même dans le temps, qui ne peut satisfaire les exigences d’une justice rendue au nom de tous. La loi, par contre, dégage en elle une force stable dès lors qu’elle est applicable sans interruption, jusqu’à son éventuelle abrogation, à tous sans exception.
La suite : Partie III - La loi