14 Octobre 2011
Faut-il que l’homme ait peur pour être bon ? Faut-il une menace pour desservir le mal ? Faut-il être sanctionnable pour adopter un comportement irréprochable ? La religion a fait de la peur un instrument à son service. Que l’homme pêche sa vie durant et l’enfer sera sa demeure éternelle. Le politique a su également, et sait encore, user de la peur pour servir ses fins. Machiavel n’a-t-il pas dit au prince que son pouvoir ne trouverait pas de meilleure alliée en la peur qu’il inspire ? La peur donc pour assoir son emprise et prolonger son empire, pas la haine car cette dernière rend illégitime ce que la peur a produit. Le totalitarisme ne fonctionne pas autrement. La peur est à la fois utilisée pour installer un pouvoir totalitaire et le maintenir en le légitimant. L’Etat totalitaire serait ainsi la seule structure capable de tenir les hommes en respect et d’éviter qu’ils ne s’entretuent. Cette pensée voudrait que naturellement l’homme est dangereux pour son prochain, et que seul un pouvoir les dépassant leur assure une survie réciproque, ce que nous dit Hobbes dans Le Léviathan : « Aussi longtemps que les hommes vivent sans un pouvoir commun qui les tienne tous en respect, ils sont dans cette condition qui se nomme guerre, et cette guerre est guerre de chacun contre chacun. » Ainsi, l’homme serait disposé à la violence que seul le pouvoir peut contenir. Hobbes justifie la politique pour pacifier cet homme de la nature incapable seul de respect. Mais la pacification peut aussi devenir une idée totalitaire lorsqu’elle vise à uniformiser au lieu d’unifier. C’est alors une guerre qui ne dit pas son nom, celle qui oppose l’individu au système, et ce même si aucune arme n’est employée, si ce n’est la peur. Cette dernière est peut-être d’ailleurs la plus redoutable de toutes, parce qu’elle est en mesure de dérober à la paix ses plus beaux habits pour déguiser son forfait en une nécessité.