4 Octobre 2011
Déclarer que « nul n’est méchant volontairement », ce que fît Socrate d’après Platon, c’est considérer qu’il y a une rupture entre le mal et la volonté. Autrement dit, la volonté ne veut pas le mal. Si la méchanceté se fait jour, c’est parce qu’on veut mal, et non le mal. Socrate reconnaît ainsi l’erreur comme la source de ce qui est mauvais, parce que la volonté tend forcément vers le bien, lequel ne se produit pas dès lors que l’on se trompe à son propos. Je veux ce que je pense être bien, sauf que la passion m’aveugle et me voici donc faire le mal sans vouloir ce dernier mais son contraire. L’empire des affects gouverne ainsi la volonté par l’illusion dont il est le metteur en scène. Avec la proposition de Socrate, c’est une forme d’innocence qui entre en ligne de compte pour ce qui est de juger tout acte mauvais. La vision socratique du mal est très optimiste en affirmant que la nature humaine est une inclination au bien. Personne ne souhaiterait le mal pour quiconque, ni pour soi. Nous pourrions même conclure, en suivant Socrate, que le mal n’existe pas, qu’il n’y a que du mauvais. Le tyran par exemple aspire au bien de son peuple, mais sa conception du bien collectif n’est pas celle de l’intelligence, de la raison, mais des pulsions. Le pédophile ne se satisfait pas du mal dont il est l’auteur. S’il agit de la sorte, c’est certes sa volonté qui l’entraîne, mais celle-ci est déterminée par un passé douloureux. Avec Socrate, on ne reconnaît personne comme foncièrement méchant. Une méconnaissance de ce qui est réellement bien, ou le poids trop lourd d’une histoire, participe du mal commis. Avec Socrate, on déresponsabilise. Avec Socrate, la volonté, donc la nature humaine car celle-ci se constitue avec celle-là, tend irrémédiablement vers le bien. C’est son asservissement qui est à l’origine de tous les maux.